Cressac-Saint-Genis est une commune du Sud-Charente située à 3,5 km au Sud de Blanzac, le chef-lieu de son canton. Elle est aussi 11 km au Nord-Ouest de Montmoreau, 13 km à l'Est de Barbezieux, 14 km au Nord de Brossac et à 25 km au Sud d'Angoulême.
Au cœur des collines du Blanzacais, dans une ancienne commanderie de Templiers nommée « du Dognon », se trouve une chapelle construite au milieu du XII° siècle.
Elle a été restaurée au début du XX° siècle, trois des quatre murs étant encore recouverts de peintures représentant les combats des Croisés ou de personnages mythiques comme Geoffroy Martel,
frère de Guillaume Taillefer.
La présence d'un puits jamais à sec a permis aux Templiers de faire bâtir une commanderie et de s'installer sur le chemin du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.
Sur la commune de Cressac-Saint-Genis, sur le lieu-dit Saint-Genis, s'élève la chapelle des Templiers du Dognon. Érigé dans une région vallonnée, l'édifice se
dresse aujourd'hui seul, sur une éminence dont il est évident qu'elle a été choisie en fonction de son intérêt stratégique. Sorte de butte naturelle, dominant la vallée du Né, vulnérable
seulement du côté Sud, le site pouvait être facilement fortifié et défendu, et donnait en outre à ceux qui l'occupaient la possibilité de surveiller, jusqu'à des distances de plusieurs
kilomètres, routes et chemins avoisinants.
Comme cela se vérifie souvent, en Saintonge et ailleurs, la chapelle est le seul bâtiment de la commanderie qui soit parvenu jusqu'à nous. De plan rectangulaire, elle comporte
des murs épais (1,20 m) épaulés par des contreforts peu saillants.
Il semble que la construction de l'édifice puisse être datée des années 1150-1160.
L'édifice rectangulaire mesure seize mètres soixante de longueur sur huit mètres soixante environ de largeur. Il est couvert d'une voûte en berceau s'appuyant sur des cordons chanfreinés. Des
arcs disposés sur pilastres, au revers de la façade et contre le mur droit du chœur, l'épaulent. Suivant une règle généralement observée, leurs sommiers reposent sur des chapiteaux nus, établis à
hauteur des cordons. Le chœur faisant suite, sans interruption, à la nef, reçoit un vif éclairage par un triplet et par une rose quadrilobée qui le surmonte. En dehors des moulures agrémentant le
triplet et la fenêtre, ébrasée, percée au mur de la façade, aucune autre décoration n'apparaît dans la chapelle.
Au pignon Ouest s'ouvre un portail roman d'une grande sobriété dont les deux voussures en plein cintre, nues, retombent sur des colonnettes aux chapiteaux bruts d'épannelage ou à la corbeille
simplement annelée. Au-dessus, une petite baie. La façade est divisée par trois cordons qui apportent un vigoureux contrepoint à l'élan vertical des contreforts et des ouvertures.
Deux voussures en plein cintre entourent le portail, mais peu de sculptures ornent les chapiteaux ; plusieurs sont simplement annelés. Des cordons marquent les étages de la façade qui serait nue
si une faible ouverture ne se voyait sous le pignon, dépourvu, cette fois, de clocher-arcade.
Chevet :
Un triplet de fenêtres en plein cintre, aux archivoltes rehaussées d'un cordon sculpté, évoque la trinité. Il est surmonté d’un oculus à quatre lobes pour accueillir la lumière depuis les quatre points cardinaux.
Toutes les parois intérieures étaient couvertes d'un enduit peint à fresque. Ces peintures ont disparu au Sud, le mur ayant été détruit, puis reconstruit à la période moderne.
L'attrait primordial de cet oratoire réside dans ses magnifiques fresques, dont la tonalité brun-rouge s'apparente à la peinture romane. Celles-ci, en effet, exécutées à la fin du XII° siècle, couvraient jadis tout l'intérieur de l'édifice. La chapelle ayant longtemps servi de grange, les fresques ont été détériorées.
Parmi les quelques personnages isolés, encore visibles, figurent :
sur le mur Est :
- Un ange (archange Saint Michel ?) tenant une balance, symbole du jugement,
au-dessus, Chrisme (comme celui de la cathédrale Saint Jacques de Compostelle) avec la lune, le soleil, l’alpha (voir le petit oméga au dessus du alpha)
- Un évêque mitré, portant sa crosse et bénissant. Sans doute, l'artiste aura figuré Adémar, évêque du Puy, qui prit part à la première croisade,
L'artiste a représenté, à gauche du triplet, la pesée des âmes le jour du Jugement et, à droite, un évêque bénissant.
sur le mur Ouest :
- Un roi à cheval parmi des fleurs de lys, très vraisemblablement Philippe-Auguste, partant pour la Terre-Sainte. Afin de mieux souligner son rôle de libérateur de la Chrétienté, l'artiste l'a représenté dans la même attitude que celle donnée à Constantin par nos sculpteurs, sur les façades de nos monuments.
Au revers de la façade, l'artiste a représenté :
- un guerrier, armé d'une épée et protégé par un grand bouclier triangulaire, s'interpose entre une femme et le dragon qui la menace (légende de Saint Georges patron des templiers sauvant la
princesse de Sylène).
- De l'autre côté de la fenêtre, dans un champ de fleurs de lys, un cavalier foule un homme renversé à terre. Une femme couronnée assiste à la scène.
- Dans l'ébrasement de la baie, une nef à la voile gonflée par le vent emporte deux personnages dont l'un, tourné vers la poupe, lève les bras comme en signe d'adieu.
Les fresques du mur septentrional, souvent reproduites, et aujourd'hui très mutilées, évoquent sur deux registres des combats opposant Croisés et Sarrasins.
Toutes ces scènes sont circonscrites, soit par des rinceaux de feuillages, soit par des frises aux motifs géométriques. L'ensemble aurait été peint dans les années 1170-1180, soit quelque vingt
ou trente ans après la construction de l'oratoire. Si, grâce à l'architecture de la chapelle et à ses fresques, il est possible d'avancer que les Templiers avaient implanté une maison en ce lieu
dès le milieu du XII° siècle, ou peu après, on ne possède aucun détail sur les bâtiments qui composaient la commanderie, disparus depuis longtemps.
Deux fresques ornent encore le mur septentrional. Hautes de plus d'un mètre et séparées par des bandes stylisées, elles rappellent des scènes militaires de la vie des croisés.
* La première, assez confuse, nous montre des cavaliers chevauchant près de leurs tentes, ainsi que des charges de cavalerie brisant l'attaque des Sarrasins.
Autre interprétation : Sur la gauche, deux chrétiens (ou chrétiennes) sortent d'un camp de toiles encadrés de deux musulmans. Il peut s'agir d'un échange de prisonniers. Le cavalier isolé serait Hugues VIII de Lusignan (père de Guy de Lusignan, roi de Jérusalem). Nous sommes sous les autorités de Saladin et de Baudoin IV le lépreux.
* La seconde, plus ordonnée, à l'étage supérieur, nous fait assister au départ des chevaliers pour le combat, les femmes dans les créneaux les regardent partir. Sortant d'une ville hérissée de tours crénelées (Antioche ?), ils s'élancent au galop de leurs chevaux à la poursuite de cavaliers ennemis, battant en retraite vers leur camp (Alep ?). La scène offre d'autant plus d'intérêt que l'un d'eux est ceint d'une couronne. Il s'agit donc d'un combat mémorable au cours duquel Nur al-Din Mahmud, atabeg d'Alep et de Damas, fut vaincu à la Bocquée - plaine de la Beka'a (1163), alors qu'il venait d'attaquer le krak des Chevaliers.
Remarques :
- Les Francs ont le visage pâle, le bouclier triangulaire (écu), le heaume à nasal, les selles fortement relevées à l’avant et à l’arrière, des étriers mais pas de rênes (les mains tiennent
le gonfanon et la lance).
- Les Turcs ont le visage foncé, le bouclier rond (rondache), des selles plates.
- De nombreuses fleurs de lys entourent les musulmans pour indiquer que la chrétienté domine l’Islam (cette fleur évoquant la trinité à été adoptée pour la première fois par Louis VII, sur les conseils de l’abbé Suger, comme emblème de la royauté Française). Leur présence est un hommage au premier roi ayant encadré une croisade (Louis VII a pris la tête de la deuxième croisade en 1147 avec sa jeune épouse Aliénor).
Le retentissement de cette victoire avait été particulièrement profond en Aquitaine. L'armée des croisés comprenait, en effet, un contingent de chevaliers de l'Angoumois commandé par Geoffroy Martel Taillefer qui s'était distingué au cours des opérations. Un témoignage de cette participation est d'ailleurs fourni par les armoiries des Taillefer (losanges d'or et de gueules), identifiables sur l'un des écus peints dans la fresque. Cette illustration des croisades, si émouvante à contempler dans cette chapelle de Templiers, évoque, non sans grandeur, la longue et courageuse lutte qu'ils avaient inlassablement poursuivie en Palestine.
Mur extérieur Sud :
Sur la partie droite du pilastre central il faut remarquer une pierre fortement usée par le vif frottement de pèlerins de St Jacques (main de pénitence).
Au Moyen Age, le pèlerinage était avant tout un moyen de faire pénitence, c’est-à-dire de changer sa vie après de graves manquements.
Principalement aux XII° et XIII° siècles, Cressac se trouvait sur une variante Nord-Sud de la via Turonensis, itinéraire du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.
La via Turonensis (ou voie de Tours) est le nom latin d'un des quatre chemins de France du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, le plus au Nord.
Le chemin de Saint-Jacques parcourt 175 km dans le département de la Charente. Mais les chemins en Charente ont été multiples.
Les étapes de ce chemin référencées en Charente sont les suivantes : Nanteuil-en-Vallée (Abbaye Notre-Dame), Ruffec (Église Saint-André), Tusson (Abbaye), Marcillac-Lanville (Prieuré de Lanville), Saint-Amant-de-Boixe (Abbatiale), Angoulême (Cathédrale Saint-Pierre), La Couronne (Abbaye Notre-Dame), Mouthiers-sur-Boëme (Église Saint-Hilaire), Charmant (Église Notre-Dame), Plassac (Église Saint-Cybard), Cressac-Saint-Genis (Chapelle des Templiers), Aignes-et-Puypéroux (Abbaye Saint-Gilles), Montmoreau-Saint-Cybard (Église Saint-Denis) et Aubeterre-sur-Dronne (Église Saint-Jacques).
Après la Révolution, les bâtiments ont été vendus comme bien national à un agriculteur qui, pour abriter des animaux et du fourrage dans la Chapelle, réalisa les travaux nécessaires.
En 1871, le peintre Angoumoisin Eugène Sadoux, profitant de circonstances favorables, réalisa des aquarelles montrant des parties maintenant disparues nous permettant d'interpréter plus facilement certaines représentations picturales (ces aquarelles sont actuellement déposées au musée d'Angoulême).
En 1902, la Chapelle est acquise par la Communauté protestante de Barbezieux qui la fait classer au titre des monuments historiques en 1914, et réalise les travaux de restauration vers 1920-1930 ainsi que récemment.
La restauration des peintures :
Les peintures des murs Est et Ouest ont été restaurées par Mlle Mesdrikoff qui a ensuite déposé la totalité du mur Nord par collage sur des draps de 1950 à 57. Les rouleaux obtenus ont été
envoyés aux ateliers nationaux pour restauration. Puis l’ensemble de la peinture a été collé sur un contreplaqué marine pour l’exposer pendant 10 ans au musée des monuments français du Trocadéro.
Ce n’est qu’à la fin des années 60 que la chapelle a récupéré le décor posé sur treillis de bois d’acajou.
Sources
Textes :
Cressac-Saint-Genis, wikipedia
Commanderie de Cressac, wikipedia
Dictionnaire des églises de France (Poitou Saintonge Angoumois) Tome III-C pp 59-60, Ed. Robert Laffont, 1967
La chapelle de la commanderie templière Du Dogon, grandsudinsolite.fr
La Chapelle de la commanderie Templière, coteauxdublanzacais.fr
Les Maisons et commanderies des
Templiers de France, templiers.net
Via Turonensis, wikipedia
Photos de l'intérieur de la Chapelle (7) : Comite de découverte, de sauvegarde et de valorisation du patrimoine en Blanzacais et alentours, 6 rue de la Tour , 16250 Blanzac
Porcheresse - Tél. 07 66 84 38 80
Photos numériques : 2022
(en-tête : [NU922-2022-2906] 16 - Cressac-Saint-Genis - Chapelle Templière : Chevet (Façade Est))