Montmajour
Située au cœur du pays d’Arles, l’abbaye de Montmajour est fondée en 948 par des moines bénédictins. L’abbaye, destinée à une communauté de 50 à 80 moines, se compose de plusieurs bâtiments et forme un répertoire des styles roman, gothique et classique, présentant huit siècles d’histoire et d’architecture monastique de 948 à 1791.
Dès la fin du X° siècle, elle devient l'une des abbayes les plus riches de Provence et le monastère se développe, entre le XI° siècle et le début du XVIII° siècle, par la construction d'une série de bâtiments religieux et militaires.
Abbaye de Montmajour
Aux portes d'Arles, sur un îlot rocheux émergeant des marais, le Mont Majour, se fixe au X° siècle une communauté de moines bénédictins. Ils édifient le premier monument de l’abbaye : l’Ermitage Saint‑Pierre, une chapelle semi‑troglodyte unique en Provence. Ils construisent par la suite une église abbatiale sur le rocher. Dans la crypte de l’abbatiale sera conservée une relique de la vraie croix. Cette dernière attire un très grand nombre de pèlerins à l’abbaye : le pèlerinage du Pardon est créé.
Au XII° siècle, les moines font construire la chapelle reliquaire Sainte‑Croix, à l’extérieur de l’abbaye, pour y déposer la relique et accueillir les fidèles et les pèlerins tous les 3 mai. La
relique n’y est déposée que pour le pèlerinage, elle est conservée dans la salle du Trésor le reste de l’année.
À la fin du XIII° siècle, l’abbaye est à son apogée. Elle étend son pouvoir spirituel de l’Isère à la Méditerranée à travers cinquante‑six prieurés. Durant la guerre de Cent Ans, l’abbaye est
fortifiée avec la construction de la tour de Pons de l’Orme et de remparts, pour la défendre des attaques et des pillages.
Au XVII° siècle, la congrégation de Saint‑Maur s’installe à l’abbaye et réforme la vie monastique tant au niveau matériel que spirituel. Les mauristes prônent un retour à une vie monastique plus pieuse. Cette réforme entraîne un nouvel essor et la construction d’un nouveau monastère : le monastère Saint‑Maur. À la Révolution, ce dernier est vendu comme bien national puis dépouillé de sa toiture, de sa charpente et entièrement démantelé par ses acquéreurs.
La Crypte [1]
- La crypte ou église basse
En partie troglodyte, la crypte construite au XII° siècle a pour fonction première de rattraper la forte déclivité du rocher, servant ainsi de fondation à l'abbatiale édifiée au-dessus.
La crypte ou église basse est constituée d’un plan en croix latine avec déambulatoire et chapelles rayonnantes. Son plan élaboré permettait d'accueillir de nombreux fidèles le 3 mai lors du pèlerinage de la Sainte-Croix institué dès l'an 1030. Dans les chapelles rayonnantes de la crypte, les moines célébraient des messes privées à la demande des familles en l'honneur des défunts.
Appelée "Art Roman Provençal", l'architecture de ce lieu reprend celle des monuments antiques. Elle est caractérisée par de larges voûtes en plein cintre, un déambulatoire rappelant le cheminement à l'intérieur des amphithéâtres romains, et une rotonde coiffée d'une coupole.
- Les marques de tâcherons
Une marque de tâcheron est un symbole, une lettre ou une forme géométrique gravée dans la pierre par un ouvrier/tailleur de pierre. Chaque tailleur de pierre choisissait sa marque et, après avoir
travaillé un bloc, laissait une marque sur celui-ci pour être payé de sa tâche. Au Moyen Age, c’était une pratique courante, et particulièrement dans les édifices romans.
A Montmajour, ces marques sont présentes en très grand nombre dans la crypte / église basse. Elles couvrent une bonne partie des murs et sont surtout présentes sur les piliers et
les voûtes qui portent le poids de l’abbatiale.
L’abbatiale Notre-Dame
- La Nef [15]
La nef est achevée au XII° siècle et témoigne de l’architecture romane provençale à son apogée. Elle a un plan en croix latine à nef unique de 14 mètres de large, voûtée en berceau et d’une très grande hauteur. La voûte en berceau repose sur des doubleaux à deux ressauts qui retombent sur des piliers cruciformes. L’abside est précédée par une étroite travée de chœur qui est bandée sur un arc en plein cintre. Le fond de l’abside n’a aucune décoration, il dispose seulement de trois baies en plein cintre qui ont été décentrées pour éviter une ouverture au mistral. Pour laisser plein le mur Nord qui épaule cette construction à flanc de rocher, les fenêtres du chœur assurent l’éclairage intérieur ainsi que les baies hautes de la croisée du transept ajoutées au XIII° siècle. Sur cinq initialement prévues, seules deux travées sont construites.
- La Chapelle Notre-Dame La Blanche [16]
Située dans le transept Nord de l’abbatiale, elle conserve deux enfeus dont l’un abritait la sépulture de Bertrand de Maussang, Abbé de Montmajour au XIV° siècle.
- La Sacristie [17]
La sacristie est située à l’Ouest de la chapelle Notre-Dame La Blanche. Les très nombreux inventaires expliquent que les moines conservaient ici les vases sacrés, les vêtements sacerdotaux et les ornements liturgiques. Le reliquaire de la « Vraie Croix » était déposé dans la sacristie. Un lavabo du XVIII° siècle complète ce mobilier.
Le Cloître [9 ... 14]
Le cloître de Montmajour (XII°) s'apparente par son architecture aux abbayes cisterciennes. Quatre galeries percées d'arcades supportées par des colonnes et des chapiteaux
s'ouvrent sur le jardin central où se trouve une citerne. Les voûtes sont en berceau et supportent une toiture faite de dalles. Les consoles sculptées côté mur et les chapiteaux placés côté
jardin évoquent tout à la fois des sujets profanes, sacrés, réels et fantastiques. Les animaux, surtout, sont en grand nombre. Ils illustrent ce monde médiéval peuplé de bêtes et de monstres, une
faune à la mesure de l'homme (ours, chameaux, béliers, âne) mais sauvage également, et inquiétante (tarasques, dragons, chimères...) ou bien totalement fantaisiste comme ces faces humaines
portant des cornes et côtoyant des diables entourés de flammes...
Ces sculptures remarquables rappellent le cloître de la cathédrale Saint-Trophime d'Arles. La richesse
du décor (cannelures, feuilles d'acanthe...) témoigne du goût des moines pour la culture antique. Les décors de la galerie Nord ont été restaurés au XIX° siècle par l'architecte Henri Révoil
(1822-1900).
D : Galerie Nord
E : Galerie orientale
F : Salle capitulaire
G : Galerie occidentale
H : Réfectoire
I : Galerie méridionale
Un monastère est en somme une vaste nécropole, un monde de transition avec l'au-delà, promesse de Salut Éternel. Dans le cloître de Montmajour, la galerie Nord a rempli particulièrement cette fonction funéraire illustrée par la présence des enfeus (grandes niches), des pierres tombales et des dates dédicaces au sol.
Implanté sur le flanc Sud de l’église, le cloître mesure 27 mètres de long et 24 mètres de large. Il s’organise en quatre galeries de 4,30 mètres de large et s’articule autour d’une cour centrale dotée d’une citerne qui recueille les eaux de pluies. Ces eaux sont collectées pour l’alimentation de la communauté religieuse grâce à l’impluvium formé par des dalles de toiture imbriquées.
Cloître : Consoles, culots ou culs-de-lampe
Les sculpteurs du XII° siècle ont représenté, selon une symbolique complexe, un monde animal pensé pour l'édification des moines et l'éloge du Créateur. Chaque animal évoque une personnalité et des sentiments comparables à ceux des hommes, reflet symbolique d'une réalité spirituelle, incarnant l'affrontement entre le bien et le mal : chat, ours, âne, chèvre ... Leur représentation sur des consoles traduit l'asservissement de l'animal à l'homme. La distinction entre les animaux exotiques et mythiques n'existe pas dans la société où les hommes se déplacent peu. S'y ajoutent des compositions hybrides et des monstres anthropophages, comme la Tarasque. La légende voulait que ce monstre, mi-dragon mi-lion, dévorât ceux qui voulaient traverser le marais du Rhône : dans le cloître, il est représenté avec une victime dans la gueule.
Abbaye de Montmajour
- Abbatiale Notre-Dame
1 Crypte
2 Tombes rupestres
3 Ermitage Saint-Pierre
4a Tour Pons de l'Orme
4b Chapelle Sainte-Croix
- Extérieurs
5 Basse-cour
6 Porterie
7 Monastère Saint-Maur
8 Ancien cellier
- Cloître et Bâtiments conventuels
9 Galerie Ouest
10 Galerie Sud
11 Réfectoire
12 Galerie Orientale
13 Salle capitulaire
14 Galerie Nord
15 Nef
16 Chapelle Notre-Dame La Blanche
17 Sacristie
18 Salle des archives
La Tour Pons de l'Orme [4a]
Construite vers 1369, sous l'abbatiat de Pons de l'Orme, par le maître d'œuvre Guillaume de Helinc, la tour a pour but de défendre le monastère contre les Grandes Compagnies.
En 1655, la tour est frappée par la foudre. Cette brèche sur la façade Est sera restaurée en 1740 par la communauté.
L'architecture de la tour suit un plan rectangulaire, avec un ressaut sur la face Sud-Ouest qui enferme un escalier à vis desservant le 1er étage et la terrasse. Ses murs appareillés en bossage sont couronnés de créneaux, de mâchicoulis et de merlons percés d'archères en croix de Malte, qui en font une tour d'architecture militaire.
La tour est voûtée d'une double croisée d'ogives. Les deuxième et troisième niveaux en bois ont disparu.
Extérieurs
Sources
Textes :
Abbaye de Montmajour, fr.wikipedia.org
Les graffitis marins - Dossier thématique, Centre des Monuments Nationaux
Signalétique locale
Visite de l'abbaye de Montmajour, Centre des Monuments Nationaux
Textes/Plans :
L'Abbaye de Montmajour - Nouvelle fiche de visite, Centre des Monuments Nationaux
Abbaye de Montmajour - Fiche de visite, Centre des Monuments Nationaux, 2021
Plans :
Architecture romane du midi de la
France, Henry Révoil, Tome II, 1873, planches XXXI et XXXII
Le cloître de Montmajour, Centre des Monuments Nationaux
Photos numériques : 2023